Extraits de notes

toile libre 2014 ©BD-F

Les tracés ondulatoires, même si parfois marqués de ressauts, assurent la continuité, (onduleuse, refrain après refrain), tandis que rencontres et brisures se produisent ponctuellement, tels des moments remarquables intervenant dans le cours ininterrompu du flux.

Ces deux types d’approche agissent en complémentarité. Le premier est ainsi un fond auquel je retourne constamment, une onde « traversante » et continue que je module au gré des jours, modifiant sensiblement les intervalles à l’expérience et à la hauteur des couleurs choisies, à leurs accords et désaccords.

Je le comparerais à une masse sonore en évolution constante et au déroulement illimité.

 

Le deuxième relève davantage de l’éclat, d’un événement ; il se découvre en arrangements formels et colorés trouvant origine et appui dans les tracés poursuivis en parallèle.

Ces éclats sont tels des sonorités dissonantes, proches des timbres de certaines œuvres de musiques contemporaines du 20ème siècle, de Pierre Boulez en particulier, tandis qu’en arrière plan progresse la masse sonore qui les soutient ; à poursuivre les comparaisons musicales, j’associerai plutôt cette dernière au Ligeti de « Lontano » ou encore à Phil Glass.

 

Il fut une période, au début des années 80, où je m’intéressais particulièrement à ce genre musical ; je n’ai pas poursuivi depuis, mais les sonorités que j’associe ainsi à certaines teneurs de couleur dans la peinture, sont demeurées vives à ma mémoire

 

 

                                                                                                                             *

 

Mon travail s’organise en modes, couleurs et périodes qui, simultanément, s’opposent et se rassemblent, se contredisent et se complètent.

Je m’attache à dégager un système pictural éloigné des conventions et indifférent aux genres, tant dans l’appréciation que l’organisation, afin de dégager des modes opératoires susceptibles d’ouvrir de nouvelles voies, toujours incertaines avant d’être validées par l’expérimentation.

En même temps toutes ces tentatives ne se font ni au hasard, ni sans raison. Elles sont portées par l’épaisseur de toutes les réalisations antérieures, considérées et reprises à l’aune de ce que les plus récentes ont permis de découvrir.

 

Je ne cherche aucune réponse, pas plus à asseoir des certitudes, seulement à mettre à jour les hypothèses et les questions nouvelles qui me permettront de prolonger le travail, souvent dans des directions imprévues que je me fais devoir d’accompagner.

 

 

« La question (…) alors entre tant d’à-vifs, à la fois dispersés par son éclat et rassemblés par sa présence, elle maintient un tremblement qui est la nudité. »

 

Bernard Noël, Le lieu des signes

 

 

Je ne nommerai que la couleur que je reconnais ; celle qui se peint échappe à la nomination, car il me suffit de prendre du jaune pour que le bleu se déclare et, de leur rencontre, sourde une troisième couleur qui ne sera même pas le vert, mais la nudité même.

 

                                                                                                         S.F janvier 2015